J’aime provoquer ! Quand je sens en face de moi quelqu’un imbu de sa personne, j’écoute, je jauge, j’observe autour de moi la réaction de chacun des intervenants… Je mûris le sujet et souvent je lâche LA bombe qui va déstabiliser et confronter le beau parleur à ses propos hautains.
Ainsi, il m’est arrivé plusieurs fois d’écouter ce genre d’individus parler des psys, dans le langage fréquemment employé on retiendra « charlatans » qui est je crois le terme récurrent number one (médaille d’or !)… Je laisse donc notre prétentieux s’épancher largement sur l’inutilité des psys, leur inefficacité, leur manipulation mentale, leurs interprétations à la mords-moi-le-noeud, etc… Tout doucement en moi se répand l’agacement devant tant de préjugés, devant aussi l’étendue des non-connaissances de mon interlocuteur, voire de l’entourage, car qui de renchérir : « ouais, tu as raison, les psys, tous des cons, et d’abord, j’suis pas fou !!! »… AH ! Soupir de soulagement intérieur, enfin un qui lâche le mot ! N’y tenant plus, alors, posément, j’ouvre enfin la bouche et lâche ces mots déjà tant de fois prononcés : « Tu as donc déjà fait une thérapie ?! Tu as l’air de t’y connaître ? »…
Et mon interlocuteur de me répondre, immanquablement : « Ben non, mais tout le monde sait comment ça se passe, chez un psy, tu dis des choses et il te dit ce que tu dois faire ou dire ! »…
Sourire mi-moqueur, mi-provocateur de ma petite personne… et j’enchaîne : « Ah ? Tout le monde !!! Oui effectivement, certains pensent que ça se passe ainsi, sauf que je ne comprends pas comment tu peux affirmer cela sans même avoir mis un orteil (et je ne te parle même pas d’une oreille !) dans un cabinet psy ! Je vais donc t’expliquer comment ça se passe, vraiment, et démonter tous tes préjugés, là ! »
Inévitablement je lis la stupéfaction dans le regard, ce regard qui signifie : toi, toi tu vas chez un psy, mais t’es pas folle pourtant !
BEN NON ! JE NE SUIS PAS FOLLE, POURTANT !!! (enfin, pas au sens psychiatrique du terme, j’ai bien quelques petites folies mais que serait la vie sans ça ?)
Installons-nous, la tirade va être longue !
« Voilà comment je conçois les choses, moi : nous sommes des êtres vivants dits êtres supérieurs car capable de penser. Nous sommes également constitués d’une enveloppe corporelle. Je suppose que lorsque tu es malade tu vas chez le médecin pour soigner ton corps, mais je ne vois pas comment tu ne pourrais jamais être atteint dans ton psychique, puisque nous sommes à des âges où, forcément, la vie a laissé quelques blessures, quelques cicatrices. Tu as là la raison pour laquelle je fais une thérapie.
Maintenant, comment ça se passe quand tu vas voir un psy… Il y a auparavant un élément clé : choisir le thérapeute avec qui tu te sens bien, celui avec lequel tu sens que tu vas avancer… Une fois que tu as trouvé, alors tout coule. Lors de la première séance, en général, tu fais une esquisse de ton schéma familial, parents, grands-parents, fratrie, enfants, conjoint, etc… Tu commences aussi à essayer de donner la raison pour laquelle tu ressens le besoin de venir consulter… Mais le propre de la thérapie, justement, c’est de ne pas savoir exactement les raisons qui te poussent à consulter, puisqu’elles sont là, enfouies en toi, et que seul ton psy parviendra à faire émerger. Je dis bien émerger puisque ce n’est pas lui qui va te dire : « oula, tu as fait tel laspus, ça veut dire ça ou ça ! ». Non ! Un thérapeute est là pour réagir à certaines de tes phrases, à certains mots employés malgré toi (fruit de ton inconscient et non pas fruit du hasard), en te disant : « pourquoi ? », « Comment vois-tu cela », etc… Donc, bien loin de lui l’idée de te donner tes réponses. Une thérapie est un travail à part entière, destinée à mieux te connaître toi-même, à aller au bout de ce que tu es au fond de toi, à avancer vers cet « être », à laisser derrière toi les écueils du passé, en les acceptant, tout simplement. C’est long, une thérapie, ce n’est pas un coup de baguette magique, et ça demande du courage : celui de se confronter à son histoire personnelle, familiale, sociétale…
Voilà comment ça se passe chez un psy, voilà les raisons qui m’ont poussée à consulter : mon passé a de l’importance dans mon présent et je souhaite passer au-dessus des traumatismes qu’il a engendré pour vivre mieux. Mais le comprends-tu ? Cette thérapie me demande de me décentrer de mes certitudes pour évoluer et m’ouvrir davantage aux autres… Alors non, on n’a pas besoin d’être fou pour aller consulter, ceux qui pensent ça en sont restés aux siècles passés… Et manquent à mon sens d’ouverture d’esprit et de tolérance !… Mais ce n’est que mon opinion !… »
Je rajouterais aussi qu’il faut se préparer à remettre en cause toute son existence, car parfois l’analyse nous amène à tout chambouler dans nos vies et donc dans celle de ceux qui nous entourent… et ça résiste en face, il faut être sacrément motivé pour ne pas se laisser détourner!
C’est sans doute cela qui est perçu comme de la folie, ces personnes pleines de certitudes se sont forgés une rempart qui les protègent sûrement du moindre changement.
Oui, tu as raison, mais ce sont ces personnes là qui vont les plus mal, à mon sens, celles qui, jamais, ne se remettent en question et pensent détenir la vérité… Tant pis pour elles, tant mieux pour nous !
Merci pour ton com et ta fidélité…