Dans ma profession, je croise des gens tout au long de la journée, des gens qui viennent pour des soins… Ils arrivent avec leurs soucis, leurs coups durs, leurs ennuis, leurs préoccupations. La plupart du temps, je parviens à mettre de la distance envers tout ça, parce que si je n’en mets pas, je ne peux être disponible le soir, en rentrant. La plupart du temps… Mais certains jours, des jours comme aujourd’hui, où pourtant le soleil brille et la douceur printanière vient éveiller mes sens, j’ai du mal. Peut-être est-ce parce qu’un jour comme aujourd’hui est empli de mauvaises nouvelles, de trop de lourdeurs, de trop de chagrins, de difficultés diverses qui touchent à tout, la santé, l’avenir, les risques, les pronostics… Peut-être aussi que ce n’est pas ça, mais que cela me renvoie à une part de moi-même, au reflet d’une société qui brise et qui ne cesse d’enfoncer plus bas, d’une société que je hais de plus en plus. Peut-être que je cerne là les limites de mon métier, que je suis frustrée de ça, aussi, que dans un monde idéal il y aurait tellement plus d’efficacité à travailler en réel partenariat, si les moyens étaient suffisants, si les parents étaient disponibles, si j’avais plus de temps, si…
Mais avec des « si »…
Alors ce soir, je vais rentrer chez moi avec tout ça, ce soir je vais tenter de m’éloigner du malheur des autres pour me concentrer sur mon bonheur à moi, ce soir je vais tenter d’être égoïste, de ne plus penser, surtout, à tout ça… Ce soir, je tâcherai de dormir sur mes deux oreilles, pour ne plus être envahie, j’essaierai de me réchauffer sous le soleil couchant et de faire le vide…
Pas toujours facile mais indispensable dans certains métiers, ce qui n’empêche pas de bien faire !
Dernière publication sur Les billets de Manuel : Le portable qui ignore l'autre
Non, ça n’empêche pas de bien faire, c’est même mieux, quand on prend de la distance, car ça nosu permet de voir des choses que les personnes concernées ne voient pas toujours… Mais oui, certains jours, c’est dur…